De la liqueur de yaourt ? Pareille boisson sonnerait presque comme une plaisanterie, tant les deux termes qui la définissent, nous paraissent appartenir à deux mondes aussi opposés que radicalement différents : la liqueur s’adresse en effet strictement aux adultes, tandis que le yaourt régalerait plutôt les enfants.
Et pourtant…
Le yôguruto-shu (ヨーグルト酒), comme l’appellent les Japonais par un terme dont on aura rapidement déduit l’étymologie, existe bel et bien, et réjouit même une très large communauté d’amateurs. Le saviez-vous ?

Il s’agit d’une boisson pouvant être bue en apéritif ou en digestif, mais qui, à l’évidence, accompagnera difficilement un repas, du fait de sa grande onctuosité. Elle s’obtient ni plus ni moins par un mélange de yaourt et d’alcool (principalement du nihonshu, le saké japonais, mais le makkori, un alcool coréen peut également être mis à l’honneur). Les résultats obtenus dépendent alors de la proportion du premier et du type du second.

L’une des meilleures liqueurs de lait japonaise nous vient de la préfecture de Miyagi, dans le Nord-Est du pays, et plus précisément de la maison Niisawa (新澤醸造店), connue notamment pour son excellent Hakurakusei (伯楽星récompensé par une médaille d’or lors des éditions 2017, 2018 et 2019 de Kura Master). Il s’agit de la chônôkô yôgurutoshu (超濃厚ヨーグルト酒) dont le goût est infiniement plus mémorable que l’intitulé, tout non-japonisant en conviendra aisément. Elle a été primée dans la catégorie Liqueurs lors du Tenma Tenjin Umeshu Fes d’Osaka et elle a obtenu la médaille d’or du Japan Food Selection.

Au premier abord et en bouche, cela ressemble à du yaourt à boire. Le ressenti est crémeux, légèrement sucré, épais, bref yaourté si tel néologisme peut être autorisé. La sensation d’alcool n’est présente qu’en arrière-goût (atoaji 後味) et demeure légère en raison d’un degré raisonnablement peu élevé (un peu plus de 5%). Cette boisson se boit seule sur glace, ou éventuellement en cocktail avec une liqueur de thé de la même maison, pour un « milk tea » alcoolisé des plus succulents et raffinés. Comme il est difficile d’exporter un produit de ce type, cette liqueur n’est disponible à la vente qu’à l’intérieur de la préfecture de Miyagi, mais si cela peut nous donner une (énième) raison de visiter l’archipel japonais, nous serions bien malheureux de nous en plaindre !

Quels ingrédients ?

-En premier lieu, des produits laitiers (du yaourt et lait entier) provenant de vaches jersiaises élevées dans les environs de la bourgade de Tajiri, dans la périphérie de la ville d’Osaki (préfecture de Miyagi). Cette race laitière bovine, provenant d’une des îles anglo-normandes où elle fut longtemps élevée en autarcie (l’Île de Jersey), est aujourd’hui mondialement connue pour la qualité et l’onctuosité de son lait. Si elle est peu présente sur le territoire français, elle est par exemple très appréciée de la dynastie anglaise d’où l’adjectif « royal » qu’on lui retrouve souvent accolé.
-Du nihonshu, autrement dit, du saké japonais. À noter qu’il existe une liqueur qui a fait le choix d’allier du makkori, un alcool coréen, à du yaourt produit dans l’île d’Hokkaidô.
-Du sucre.

Marque d’une certaine popularité, une fameuse marque de chocolat particulièrement connue pour son infinité de goûts disponibles dans l’archipel japonais, intégra la saveur de cette boisson à son catalogue. Je veux bien sûr parler de la célèbre marque rouge et blanche…

Point culture & info : historique et actualité de la maison Niisawa

La maison Niisawa, crée en 1873, élabora du saké dans la ville d’Osaki (préfecture de Miyagi) pendant près de 140 ans avant d’être entièrement détruite par le terrible séisme qui survint en 2011. Son président décida alors de délocaliser son unité de production dans la ville de Kawasaki, à la limite de la préfecture voisine de Yamagata. D’abord essentiellement connue pour le saké Atago no Matsu (愛宕の松) qui fut notamment encensé par le poète DOI Bansui (1871-1952), sa notoriété est aujourd’hui liée également à Hakurakusei (伯楽星), déjà mentionné plus haut, qui s’inscrit dans une volonté de promouvoir un excellent saké de table, susceptible d’accompagner n’importe quel plat.

En 2019, c’est Watanabe Naomi (渡辺七海) qui devient le toji de la maison (l’équivalent du maître de chai pour la viticulture) et, étant seulement âgée de 22 ans, se place comme la plus jeune à exercer un tel poste dans tout le pays. Mlle Watanabe, qui explique avoir très tôt décidé de se diriger vers les métiers de l’alimentation, fit ses études à l’université d’Agriculture de Tokyo où, fascinée par la dimension olfactive des aliments et intéressée par le shôyu et le soja, elle se spécialise dans les activités de brassage. Rapidement fascinée par le processus d’élaboration du nihonshu, elle se spécialisera dans l’étude de la confection de boissons alcoolisées en deuxième année et expérimentera les potentialités offertes par les levures, qui lui apprendront ainsi que quelques écarts de degrés seulement peuvent influencer très largement l’évolution d’une fermentation, modifiant ainsi considérablement les parfums du produit obtenu. Le saké sur lequel elle travaillera au sein de la maison Niisawa à la sortie de ses études, ayant décroché une distinction lors de l’épreuve Sake Selection du prestigieux Concours Mondial de Bruxelles, elle est nommée toji avec l’accord du directeur et explique travailler d’arrache-pied pour continuer de produire des sakés de très haute qualité.

Sources :

  1. Site officiel de la maison Niisawa
  2. Informations sur l’actuel toji

5 réponses à « LIQUEUR DE YAOURT : DES SENSATIONS PURES ? »

  1. nices!! Le saké : la boisson divine qui fait saliver ?

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  2. wow!! 77Le saké : la boisson divine qui fait saliver ?

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